Danse de mots
Danse d’encre
Ame-geste
Esprit d’un trait
Les neoGlyphes de Zombre

Au-delà des mots.
Les mots peuvent dire si on sait les écrire.
La vérité du trait.
La figuration des états intimes, l’expression des sentiments et des émotions par le jaillissement du geste, de la forme spontanée, un mouvement longtemps contenu, réfléchi, visualisé, réprimé, purifié, pour ne conserver que l’essence, l’élixir, la liqueur, la saveur, la lumière d’une intimité indicible, d’un cœur, d’une âme, brûlante ou glaciale, alternant la vie et la mort, le jour et la nuit, le Yin et le Yang, le bonheur et le désespoir, l’animal, le végétal, et le minéral. Les mots sont là, souvent invisibles, ils existent en lourdes masses, en jungle, en désert, en surfaces liquides, opaques ou transparentes, en sous-univers, en monde inversé, en microcosmes. Formes jetées, vomissures, crachats, éjaculations, ectoplasmes, auras, venin d’encre, poison, traces suspectes, contusions, hématomes, rites détournant les coups, déjouant le sort, libérant le pue, nettoyant les plaies, esthétisant la misère du corps et le désespoir de l’âme, sanctifiant la brève lumière éblouissant les étroites et sombres galerie de l’existence.
Autosatisfaction, soliloque, affection carcérale, amour narcissique, hédonisme pathétique, sexualité masturbatoire, fébrile matérialisation d’un temps insaisissable et fuyant, exhibition impudique, déjections mentales d’une digestion interminable. Sentiment d’urgence, de danger permanent, d’une précarité insoutenable. Honte de la légèreté, de l’inconsistance, de l’insouciance, de l’irresponsabilité, de la cruauté divine des humains et de soi-même…

Les mots de ma danse d’encre

Les mots peuplent l’esprit.
Ils y vivent, ils y poussent.
Ils s’y transforment, se métamorphosent, se métamorphisent, s’anamorphosent, se dissolvent, se diluent, s’ossifient, se durcissent en strates de sable ou de diamant, dorment ou exultent, s’accouplent dans la fièvre et le sang, s’affrontent en sauvages vociférations, se dévorent à belles dents, se rongent, se grignotent, se corrompent, s’empoisonnent, se digèrent, se chient, et forment un terreau fertile d’où se dégagent de nouvelles formes. Lentement, douloureusement, végétalement, ils déploient leurs signifiantes gerbes de synapses dans toutes les directions, se tordant, s’entrelaçant, se taraudant, se frayant un passage, une galerie, un tunnel au cœur des leximasses inertes.
Les mots se cherchent, se tournent autour, se flairent. Ils dansent ensemble, ils fusionnent, ils engendrent un nouvel univers de mots : un lexitope, recouvert d’une dense forêt de cercles, de jambages, d’empattement, de pleins et de déliés, de creux et de bosses, de feuilles et de pétales, de griffes et de dents, des nuits tropicales, des squelettes calcinés, des plaies, des cicatrices, des rides, des gerçures, des espoirs désespérés, des lavis de larmes, des barbouillages de sperme et de sueur, les joies de l’or-feu, la douceur de la soumission, l’éblouissement du réel, la torpeur d’un bonheur flottant, légions déchaînées en proie au carnage.
Sélection naturelle. Epuration cruelle.
Il ne restera que quelques coquilles vides, quelques mues promenées mollement au gré des vents, au cœur d’un désert sans âge, un désert de néant.