L'enfant des fées

 

 

La nuit de Noël, il n' a pas neigé.

Cette nuit là, quelqu'un déposa un enfant sur le pas de ma porte.

Il était blond, gai, rose et tellement beau que j'aurais voulu le garder toujours. Je passais autour de son cou un petit crucifix d'or et le baptisais Gabriel.

La nuit de la passion, un homme vêtu de noir vint frapper à ma porte.

Il me réclama l' enfant en disant que ce n' était pas le mien et que j'aurai de graves soucis si je refusais de le lui rendre. A contre coeur j'ai laissé partir le nouveau né dans les bras de cet homme qui aurait pu être le diable. L'enfant n'a pas pleuré, mais moi si.

A la Toussaint, un adolescent est venu chez moi. Il m'a dit qu'il m'aimait car ma vie coulait dans son âme. Bien que ne comprenant pas le sens de ces paroles étranges, je reconnus Gabriel. Il resta chez moi jusqu'à la Noël.

Ce soir là, il quitta la maison en me laissant un paquet de vêtements et un livre. Il disparut dans la nuit glaciale et je demandais à Dieu de vite me le rendre.

Le matin de l'épiphanie, je trouvais le livre de mon enfant sur ma table de nuit. Je l'ouvris. Il contenait des signes incompréhensibles, écrits dans tous les sens. Je ne suis qu'une vieille femme sans instruction.

Un soir de printemps de cette même année, revint l'homme en noir. Il me demanda si j'avais revu "l'enfant des fées" et je lui répondis que non. Lorsqu'il eut quitté la maison, je le suivis jusqu'à la rivière avec le fusil de mon défunt mari. Je l'abattis de trois balles à sanglier et je jetais son corps dans l'eau.

Cette année là et toutes celles qui suivirent, ma maison resta séche, pas d'inondation. La récolte fut belle et l'eau des sources abondante pendant tout l'été.

Je ne revis jamais l'enfant des fées.

Quand vint l'heure de ma mort, juste avant de fermer pour toujours les yeux sur le monde terrestre, je vis un jeune homme auréolé d'or se pencher sur moi et embrasser mon front.